Les tribunes

Titre Les tribunes
Exposition « Racisme en images » par le Groupe de recherche Achac

Exposition « Racisme en images »

par le Groupe de recherche Achac

Exposition « Racisme en images » par le Groupe de recherche Achac

Le Groupe de recherche Achac et de la Fondation Lilian Thuram – Éducation contre le racisme, proposent cette année (à partir de septembre 2024) une nouvelle exposition itinérante, pédagogique et mise à disposition gracieusement, consacrée au « Racisme en images : antisémitisme, xénophobie, stéréotypes, préjugés… ». Réalisée à partir du livre coécrit par Pascal Blanchard, historien et président du Groupe de recherche Achac, et Gilles Boëtsch, anthropologue et directeur de recherche émérite au CNRS, Le racisme en images. Déconstruire ensemble (Éditions de La Martinière, 2021), l’exposition souhaite démontrer comment le racisme s’est construit et véhiculé à travers des images qui ont imprégné les sociétés et leurs imaginaires, et décrypte les différentes strates de cette haine de l’« autre » dans une perspective à la fois historique, culturelle et thématique.

Parler de racisme, c’est aussi parler d’une histoire-monde, celle de la xénophobie, de l’antisémitisme, des préjugés, de l’esclavage ou celle de la ségrégation. Mais c’est aussi parler d’images : la caricature, les objets, l’affiche politique ou de propagande, la publicité ou le tract, la photographie ou la peinture… Nombreux sont les supports qui ont véhiculé la représentation de l’« autre » comme un être inférieur, stigmatisé dans sa différence, que celle-ci soit ethnique, religieuse, culturelle ou sexuelle. Ils relèvent d’une culture visuelle qui a contribué pendant des siècles à façonner des relations tronquées, marquées par une violence pouvant aller jusqu’à l’extermination ou au génocide. 

En cette semaine marquée par la journée nationale de commémoration des mémoires de la traite, de l'esclavage et de leur abolition, le 10 mai, le Groupe de recherche Achac et la Fondation Lilian Thuram – Éducation contre le racisme consacrent une tribune à la présentation de cette nouvelle exposition, disponible au prêt à partir de septembre 2024 (commissariat : Lilian Thuram et Pascal Blanchard, experts : Nicolas Bancel, Sandrine Lemaire et Gilles Boëtsch).

La Fondation Lilian Thuram – Éducation contre le racisme, créée en 2008, s’attache à lutter contre le racisme, pour l’égalité, en menant des actions de sensibilisation auprès de tous les publics, notamment par le biais d’expositions, à l’image de « Zoos humains. L’invention du sauvage », conçue en partenariat avec le Groupe de recherche Achac, de livres comme Mes étoiles noires en images (Éditions de La Martinière, 2023) mais aussi d’événements d’ampleur nationale comme l’organisation chaque année, avec la CASDEN Banque Populaire et la MGEN, du concours national « Nous autres », en direction du public scolaire ; en outre, la fondation a réalisé un « guide contre le racisme au musée Eugène Delacroix » fondé autour des images et propose l’exposition « Mission H : être humain vivre ensemble » avec Les petits débrouillards. 

C’est dans cette perspective qu’elle travaille cette année avec le Groupe de recherche Achac pour la conception d’une nouvelle exposition permettant de déconstruire le racisme à travers les images et les stéréotypes qu’elles véhiculent.

En 2021, le Groupe de recherche Achac consacrait une grande journée d’études aux « Stéréotypes » pour préparer ce livre et cette exposition. Elle convoquait à cette occasion de nombreux intervenants pour s’interroger autant sur leurs origines que sur les manières de les combattre. Les stéréotypes, en tant que constructions sociales et représentations qui déforment le corps et le visage de l’« autre » en tant que personnalité collective, permettent de justifier le système social existant (comme une croyance) et d’appréhender le monde qui nous entoure (identification), par le biais d’une stigmatisation. À l’ère des réseaux socio-numériques et de l’intelligence artificielle d’un monde globalisé, les stéréotypes se diffusent à grande échelle et de manière quasi instantanée, traversent les discours politiques, fondent et diffusent le racisme et les discriminations, popularisent les processus d’exclusion, inventent et construisent des représentations (le juif, le sauvage, le rom, le gay…). La « schématisation de l’autre » se perpétue, assise sur un stock de représentations toujours actualisables. Durant cette journée, les nombreux intervenants – parmi eux Pap Ndiaye, alors directeur général du Palais de la Porte Dorée, Gilles Boëtsch, mais aussi Dominique Sopo, président de SOS Racisme, ou encore Sylvie Chalaye, professeure et directrice de recherche à l’Université Sorbonne Nouvelle, anthropologue des représentations coloniales – se sont attachés à circonscrire les stéréotypes à travers plusieurs questions : d’où viennent-ils ? Comment et par qui sont-ils produits ? Peut-on identifier des catégories spécifiques ? Quelles sont leurs modes de circulation ? Quels sont leurs effets sociaux et culturels ?

La nouvelle exposition, proposée par le Groupe de recherche Achac et la Fondation Lilian Thuram – Éducation contre le racisme est conçue dans le prolongement de cette journée d’étude (et depuis d’une dizaine de conférences en France autour de cette thématique et de l’ouvrage), et elle souhaite répondre à de nombreuses questions spécifiques à travers l’étude des images qui ont favorisé la propagation des stéréotypes et donc du racisme, qui ont produit une culture visuelle sur les individus et les identités. 

Nous vivons dans un monde d’images : elles traversent les continents, se diffusent sur les réseaux sociaux, fixent des messages, fabriquent des miroirs, structurent des identités, résument l’actualité, et elles peuvent tout autant blesser, meurtrir que rendre fier. Nous savons désormais que lorsque celles-ci sont porteuses d’une vision discriminante, fallacieuse, raciste, sexiste, discriminantes ou xénophobe, il convient de les déconstruire pour annuler leurs effets néfastes et leur portée stigmatisante. Pourtant, à bien y regarder, les images actuelles ont presque toutes une origine, un précédent. Rien de neuf, que de la répétition : l’expression change, mais pas le message. 

Fruits d’une culture, de mécanismes répétitifs, les images portent des messages d’une efficacité sans équivalent et qui touchent le plus grand nombre quand leurs auteurs savent manier l’humour, la caricature, le stéréotype ou simplement parce qu’elles sont le reflet des idées dominantes et du pouvoir en place (la propagande). L’image n’est pas neutre, ce n’est pas une simple illustration : elle est à la fois source d’histoire et partie constitutive de celle-ci. Les images antisémites, les photographies anthropologiques de femmes dénudées, celles d’exhibitions ethniques (zoos humains), ou le dessin sexiste d’un homme frappant les fesses d’une femme semblent appartenir à un monde disparu. Mais elles ont laissé place à d’autres, comme le sketch raciste « L’Africain » de Michel Lebb (1986) et, en ce début de XXIe siècle, d’autres formes d’expression toutes aussi violentes et inconcevables telle la publicité pour la marque chinoise de lessive Qiaobi et sa machine à « laver plus blanc ». La force de ces images provient de leur capacité à ne répondre à aucune règle que celle de provoquer une réaction/émotion auprès des opinions publiques. 

Ce « jeu » des représentations et des mises en catégorie aboutit à un ensemble de sociétés binaires, séparant « civilisés » et « sauvages », autochtones et étrangers, les « Blancs » et les « Noirs », les Sarrasins et les chrétiens, les juifs et les « autres », les Caucasiens et toutes les minorités « non blanches » (y compris les Irlandais et les Italiens aux États-Unis).

Ces images témoignent des formes multiples que la haine raciale prend selon la spécificité des situations, des pays et des époques. Au titre de clés de compréhension du passé, elles doivent être conservées, étudiées et déconstruites en tant que témoins de moments charnières dont il faut garder la trace. Déconstruire, ce n’est pas détruire mais démontrer les présupposés sur lesquels s’appuient ces images pour leur donner une nouvelle signification et rendre audibles leurs effets nocifs, tout en les utilisant de manière pédagogique afin de les expliquer et de mesurer leur puissance dans la transmission des idées, pensées et sous-entendus racistes.

Les corpus iconographiques sélectionnés pour cette exposition, dans toutes leurs dimensions et leurs diversités, donnent à voir les méandres de la pensée raciste et, surtout, les voies que celle-ci emprunte pour fixer les stéréotypes. Alors que les images racistes continuent à irriguer notre quotidien, il a paru indispensable d’entreprendre ce travail de déconstruction.

 

Découpage de l’exposition

 

Panneau 1 - Introduction

Panneau 2 – Images de la « race » et de la « hiérarchie des races »

Panneau 3 – Images, stéréotypes et types

Panneau 4 – Images, caricatures et faciès

Panneau 5 – Images publicitaires, humour et culture populaire

Panneau 6 – Images, juifs et antisémitisme

Panneau 7 – Images, Asiatiques et péril jaune

Panneau 8 - Images, Africains/Noirs et négrophobie

Panneau 9 - Images, Arabes/Orientaux et haine de l’islam 

Panneau 10 - Images, gitans/bohémiens et anti-tsiganisme

Panneau 11 - Images, homophobie et mépris des orientations sexuelles

Panneau 12 - Images, misogynie, mépris des femmes et anti-féminisme

Panneau 13 – Images du Blanc/métis et de la blancheur

Panneau 14 - Images, xénophobie et rejet de l’étranger

Panneau 15 - Images, esclavage et colonisation

Panneau 16 - Images, ségrégation et séparation

Panneau 17 - Propagande politique et extrémisme (nazisme, suprémacisme, apartheid…)

Panneau 18 – Du « sauvage » au « monstre » : les zoos humains

Panneau 19 – Sexualisation et exotisation des corps

 

Disponible dès septembre 2024 avec conférences exceptionnelles des commissaires Pascal Blanchard et Lilian Thuram, réservez dès maintenant en écrivant à contact@achac.com.